Pauline Souchaud

Arts visuels

Sorte d’alchimiste picturale, Pauline Souchaud ne se contente pas d’appliquer des pigments, elle les hybride par l’adjonction de résines a fin d’en changer la texture, le volume, la brillance. Par ce procédé complexe, impliquant de nombreuses étapes qui successivement se nourrissent et s’actionnent les unes les autres, elle cherche à s’extraire de la vision 2D pour tendre vers le volume, la 3D, plus propice à la sédimentation, à la déconstruction et à l’exploration. En plongeant notre regard dans certaines de ses compositions artistiques constituées de plaques de verres peintes et superposées, comment ne pas tisser un parallèle avec la plastination, cette technique d’imprégnation polymérique qui permet d’observer par transparence les tissus biologiques ?

En cherchant à induire ou accélérer des processus « naturels » Pauline Souchaud fait émerger de ses œuvres une réalité à la fois miraculeuse et poétique. Si une composition ne trouve sa justification qu’à son identifiabilité alors, qu’en est-il des images scintigraphiques ? Sont-elles abstraites uniquement pour ceux qui ne sauraient en décrypter le sens ? Passionnée par l’imagerie scientifique, à l’instar de cet atlas d’histologie dont elle ne saurait se départir, Pauline Souchaud utilise la peinture, les pigments, comme une scientifique utiliserait des réactifs. Elle manipule la matière colorée comme s’il s’agissait de fluides organiques dont elle chercherait à révéler à la fois la structure et la dimension fonctionnelle.

Exploratrice de paysages intérieurs aux con fins de l’in finiment petit comme de l’immensément grand, pour Pauline Souchaud il n’est pas d’abstraction pure, tôt ou tard tout nous ramène à la forme. Que le support utilisé soit une toile, une plaque de verre transparente, translucide ou opaque, ses œuvres semblent mouvantes, jaillissantes de couleurs ; sorte de philharmonie picturale où s’harmonisent à la perfection moments d’emphase et de retenue. Pour Henri Michaux « la peinture s’installe dans l’insuffisance des mots » et c’est bien cette insuffisance à laquelle Pauline Souchaud pallie au travers d’une série d’œuvres tout à la fois vibrantes de vie et dotées d’un incontestable pouvoir hypnotique.

Texte Alexis Tourn, Galerie NörKa